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samedi 22 février 2014

Trapattoni : en espérant une mauvaise farce


L'information a été publiée hier matin par le fameux quotidien sportif italien La Gazzetta dello Sport : Giovanni Trapattoni sera le nouveau sélectionneur de la Côte d'Ivoire après le Mondial brésilien.


Si, en matière de football, l'illustre entraîneur impose le plus grand respect, il m'a été difficile de me réjouir de cette nouvelle. C'est indéniable, "Il Trap" est un monument du football européen : ancien international italien (une vingtaine de sélections), il fut un joueur clé du Milan AC - où il a effectué presque toute sa carrière - pendant les années 1960. 

Plus encore, c'est sa carrière d'entraîneur qui impressionne : 7 scudetti (dont 6 avec la Juve), 3 coupes de l'UEFA (record battu que 15 ans plus tard par Ferguson), 1 coupe des coupes et 1 coupe des clubs champions. Cerise sur la gâteau, Trapattoni demeure l'un des trois entraîneurs (avec Mourinho) à avoir remporter le championnat de première division dans quatre pays européens différents (Italie, Allemagne, Portugal, Autriche). Chapeau.

Le lombard s'est également essayé au rôle de sélectionneur, tout d'abord avec l'Italie (1/8 de finale au Mondial 2002 et élimination au premier tour à l'Euro 2004) puis dernièrement avec l'Irlande, avec laquelle il manqua de peu la qualification au Mondial sud-africain (Thierry Henry s'en souvient).

A première vue donc, difficile de reprocher à Trapattoni son manque d'expérience, comme a pu le faire - à raison, certes - pour le débutant Sabri Lamouchi. 

Non, ce qui pose problème, c'est plutôt l'inadéquation entre le profil du candidat et les objectifs fixés. Je n'aurai pas été surpris - furieux oui, mais pas surpris - de voir la Fédération ivoirienne de football (FIF) débarquer Sabri Lamouchi à quelque semaines du Mondial pour le remplacer par un sélectionneur plus chevronné. Elle a en effet déjà procédé de la sorte avec Vahid Halilhodzic en nommant Sven-Goran Ericksson début 2010 alors que le bosniaque avait effectué toute la campagne de qualification. Sans même parler d'indélicatesse, en terme de construction sur le long-terme et de continuité, on a fait mieux.

Mais dans notre cas, la situation est toute autre : selon la Gazzetta, Trapattoni prendrait ses fonctions à l'issue de la Coupe du monde, avec pour objectifs la victoire de la prochaine CAN (Maroc 2015), la qualification à la suivante (Libye 2017) et une qualification au Mondial russe en 2018. 



A l'aube de ses 75 ans et après une carrière exclusivement européenne, l'Italien se sent-il prêt à se lancer dans cette aventure ? Contrairement à ce que certains peuvent penser, la (supranationale) FIFA n'a pas (encore ?) uniformisé les football. Et, bien qu'il y ait aussi une vraie diversité au niveau continental, le foot africain dans son ensemble demeure très différent du football en Europe. Cela implique une façon de pratiquer, mais aussi une culture, une organisation et parfois des enjeux différents. Tous ceux qui ont fait l'expérience (de Claude Le Roy à Hervé Renard en passant par Philippe Troussier) le disent. Comprendre ces différences et s'y adapter demande une certaine intelligence, une certaine envie et du temps. Si je ne doute pas que Trapattoni soit doué de la première, a-t-il encore la motivation nécessaire ? Est-il prêt à faire les efforts requis ? Et est-il sûr de vouloir débuter cette expérience qui le mènerait jusqu'à 80 ans ?

Le choix de Lamouchi avait été très critiqué. Mais le Français avait, lui, indéniablement cette envie et cette fraîcheur qui lui ont permis de s'adapter rapidement. Penser qu'à 74 ans, l'un des techniciens le plus titré d'Europe l'a lui aussi est, je le crains, une erreur.

Quelques heures après l'information de la Gazetta, la FIF publiait un communiqué sur son site :

La Fédération Ivoirienne de Football ne se sent concernéeni de près ni de loin, par cette information. 
La FIF n'a donné mandat à aucun agent pour solliciter les services d'un sélectionneur national.

Difficile de démêler le vrai du faux. Je note quand même que nulle part la Gazzetta n'emploie le conditionnel. En attendant, souhaitant que la FIF dise vrai, je préfère croire naïvement à une mauvaise farce.

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